Jeune Afrique, 9 de Abril– « Qu’on soit un garçon ou une fille, qu’on vienne de la classe aisée, moyenne ou populaire, nous sommes tous poussés par nos parents à obtenir les meilleurs diplômes possible », explique Wassim, étudiant à l’Institut des hautes études commerciales (IHEC) de Carthage, à Tunis. Considérées comme sacrées, les études sont un temps fort de la vie des jeunes Tunisiens. Avec la montée du chômage, l’obtention d’un diplôme reste le sésame indispensable pour intégrer le monde du travail. « Contrairement à nos parents, qui ont connu le plein-emploi, nous avons grandi dans une culture de la compétition. Ma tante n’avait même pas le bac et elle a pourtant fait une belle carrière dans une entreprise. Aujourd’hui, c’est impossible », ajoute Wassim. À 22 ans, ce dernier vit encore chez ses parents et n’envisage pas de les quitter avant de fonder lui-même une famille. « Pourquoi dépenser de l’argent inutilement ? Je m’entends bien avec mes parents, ils sont très ouverts et me laissent libre de mes faits et gestes. »
Tous les étudiants n’ont cependant pas sa chance, surtout quand ils sont originaires de province et doivent s’installer dans la capitale pour leurs études. L’arrivée à Tunis peut constituer un choc pour certains. Ce fut le cas pour Omar, un Djerbien venu étudier à l’IHEC. « Il ne comprenait pas la liberté de certains étudiants par rapport au ramadan, par exemple, raconte Wassim, et il a fini par quitter l’école au milieu du semestre. » Pour Sara, 23 ans, originaire de Jendouba (à 150 km à l’ouest de Tunis et à 50 km de la frontière algérienne), l’adaptation se passe en revanche plutôt bien. Comme sa sœur aînée avant elle, elle est venue à Tunis pour suivre des études d’anglais. « Ma sœur s’est mariée à 19 ans et a arrêté ses études. Mes parents ont été très déçus », confie-t-elle. Sara s’accroche, donc. Elle a commencé par vivre dans un foyer privé de jeunes filles, pour 150 dinars (un peu moins de 80 euros) par mois. Depuis un an, elle vit en colocation avec deux autres étudiantes et est ravie de son choix : « Ce n’est pas encore vraiment dans la culture tunisienne, mais cela devient très à la mode chez les étudiants. Ça permet d’économiser et, surtout, de ne pas être seul. » La colocation ne concerne d’ailleurs pas que les étudiants. De plus en plus de jeunes actifs choisissent cette solution, comme Amine, un cadre de 28 ans, qui partage un appartement avec deux amis dans le centre de Tunis.