Jeune Afrique, 8 de Junio- Voilà déjà un an qu’Omar Bongo Ondimba s’est éteint, le 8 juin 2009, dans le calme précaire d’une clinique barcelonnaise assaillie par la presse. La figure la plus admirée mais aussi la plus détestée de ce qu’il est convenu d’appeler la Françafrique – avec tout ce que cela comporte de fantasmes ou de contrevérités – disparaissait avec une bibliothèque de secrets dont on disait qu’ils pouvaient faire trembler la Ve République française… Et assurément, certains ont encore des sueurs froides à l’idée que, peut-être, il aurait pu laisser dans l’obscurité d’un coffre-fort suisse les mémoires explosives de ses quarante et un ans à la tête du Gabon…
Son fils Ali Bongo Ondimba qui, avec l’appui de la France, est démocratiquement parvenu au pouvoir, tente désormais de faire oublier la succession dynastique – même si elle a été légitimée par le suffrage universel – par un activisme à tout crin. Surnommé « Baby Zeus » quand il était encore ministre de la Défense, il est désormais épinglé par ses pourfendeurs sous le terme de « Zeus », quand une partie de la classe politique et des médias, sans doute séduits par le volontarisme de l’homme, préfèrent employer le nom évocateur de « Tsunali ».
Vitesse et précipitation
Car s’il joue la partition convenue et, pour tout dire, un peu kitsch, de la continuité et de la rupture, c’est sans doute dans le domaine du style qu’Ali Bongo a vraiment su se faire remarquer. Le nouveau président gabonais n’a rien du paternalisme de son père, et encore moins, bien sûr, de sa dimension de patriarche continental. Mais il a su marquer ses distances avec les « amis de Papa » – Jean Ping, Robert Bourgi… – et ses anciens vassaux – au premier rang desquels André Mba Obame et Jean Eyeghe Ndong, qui sont allés grossir les rangs de l’opposition. Quant à ses relations avec sa sœur, Pascaline, elles sont l’objet de toutes les conjectures. Mais Ali repousse les rumeurs sur une éventuelle brouille avec elle : « Nous sommes très soudés », affirme-t-il…
Dans le domaine économique, surtout, le Gabon a pris un nouveau départ… même si de nombreux opérateurs estiment qu’il est très risqué et mal engagé. Le nouveau programme du gouvernement se résume en un mot : « émergence », et se développe sur trois axes : interdiction de l’exportation des grumes non transformés sur place – une mesure qui risque de rapidement plonger le secteur dans le marasme –, création d’une compagnie pétrolière qui pourrait s’appeler Gabon Oil Company, et renégociation avec les Chinois du contrat sur l’exploitation du gisement de fer de Belinga. Une même vision guide ces démarches : celle d’un nationalisme économique que le pays – et les Gabonais – attendent depuis longtemps. Un seul bémol, toutefois, mais de taille : selon la plupart des observateurs, le gouvernement doit prendre garde à ne pas confondre vitesse et précipitation…