Les médias sud-africains inquiets pour la liberté de la presse

Jeune Afrique, 12 de Agosto- En 1994, l’Afrique du Sud a mis un point d’honneur, à la fin du régime ségrégationniste blanc, à garantir dans sa Constitution l’indépendance de ses journaux et le pays figure aujourd’hui dans le haut du classement mondial sur la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières, soit 33e sur 175.

Dans ce contexte, les projets de loi sur l’information et de tribunal des médias ont provoqué un tollé au sein de la profession et même de la Cosatu, puissante confédération syndicale proche du gouvernement.

"Les inquiétudes soulevées par le tribunal rappellent celles endurées par les médias durant les heures sombres de l’apartheid. Nous ne voulons pas revenir à cette époque", a souligné le médiateur de la République Joe Thloloe en référence à la censure instaurée sous ce régime.

Selon l’Institut international de la Presse (IPI), le tribunal des médias en discussion au sein du Congrès national africain (ANC, au pouvoir) serait un organisme de supervision des médias dont les membres seraient nommés par le gouvernement et qui pourrait sanctionner les journalistes en cas de manquement à l’éthique.

Les médias "ont besoin de bien s’auto-gouverner car ils dépassent parfois les limites en terme de droit", a justifié mercredi le président Jacob Zuma à la télévision publique, après la révélation dans la presse de la naissance de son enfant illégitime ou encore de l’achat de voitures de luxe au sein de son gouvernement.

Pour tenter de calmer la colère montante, une première rencontre a eu lieu mardi entre l’ANC et les rédacteurs en chef au sujet de ce tribunal.

Quant au projet de loi sur l’information, en discussion au Parlement, l’accueil de la profession a été tout aussi froid. Une fois le texte approuvé, publier des informations confidentielles sur la sécurité nationale serait passible de 25 ans de prison.

"Si le projet de loi sur la protection de l’information est voté, cela va rendre le journalisme d’investigation illégal", a estimé l’ancienne journaliste Helen Zille, leader du principal parti d’opposition l’Alliance démocratique (DA).

Les scandales tels que celui entourant un gigantesque contrat d’armement signé en 1999 au plus haut niveau de l’Etat n’auraient jamais éclaté avec une telle loi, notent les critiques.

Dans cette affaire, Shabir Shaik, le conseiller financier de Jacob Zuma alors vice-président du pays, a été condamné à 15 ans de prison pour avoir sollicité des pots-de-vin auprès de filiales du groupe français d’armement Thales. Les accusations de corruption à l’encontre de M. Zuma ont finalement été levées un mois avant son élection en 2009.

Outre les groupes de presse, des organisations civiles et même certains responsables de l’ANC se sont élevés contre les projets des autorités. L’IPI a appelé jeudi le président Zuma à modifier ou retirer ces deux projets qu’il juge "dangereux" pour la liberté de la presse.

"Il n’y a aucune intention ou plan de la part du gouvernement de museler les médias de quelque façon que ce soit", a tenu à rassurer le porte-parole du gouvernement Themba Maseko lors d’une conférence de presse.

Si la loi sur l’information et le tribunal d’appel des médias venaient à voir le jour, les journalistes envisagent d’avoir recours à la justice, a prévenu le président du Forum des rédacteurs nationaux, Monde Makhanya, devant un panel de reporters réunis à Johannesburg.

"Il y a une Constitution qui garantit la liberté de la presse dans notre pays", a-t-il rappelé.

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